Rencontre
Unis dans la vie, Danielle Cudré-Mauroux et Pierre Battaglia ont tous deux basculé dans l’écriture de romans, une fois la retraite arrivée. Leurs derniers polars respectifs, sortis le même jour, relatent subtilement le terroir local.
Alice Caspary, Journaliste
« Il ne faut pas penser qu’à la retraite notre vie s’arrête. Si on reste chez soi, on n’a pas d’histoire à raconter.» D’emblée, Danielle, graphologue de formation, pose le décor. A Territet, au centre de leur imposante véranda qui surplombe le Léman, le couple dynamique et marié depuis 30 ans explique partager la même passion depuis peu : l’écriture de polars. Le 11 juin dernier, ils sortaient par hasard et en même temps aux éditions Montsalvens leurs roman respectif, tous deux sous forme d’enquêtes locales mais bien différents : « Le Rituel des fleurs » et « On a volé la vache à Firmin ».

Un couple, deux polars
Ancien médecin montheysan, Pierre Battaglia est finaliste 2020 du Prix Vanil Noir des Editions Montsalvens avec son premier roman « On a volé la vache à Firmin ». Epris d’histoires locales, il y relate un Valais qui lui est cher puisqu’il y a grandi, et sur lequel il porte un regard doux, parfois teinté d’ironie. « Dès que j’ai vu l’énoncé du concours, j’ai visualisé ce que j’allais faire. » Une histoire du terroir. Le titre m’est venu comme ça, d’un coup. Je suis parti sur une tradition de la région, les combats de reines. Et puis j’ai inventé à mesure. Danielle m’a donné des conseils pour structurer l’intrigue, mais j’avais une idée de la trame dès le départ », dévoile-t-il, une lueur dans l’œil.
L’écriture c’est sportif mais c’est quelque chose d’absolument fascinant à vivre.
Danielle Cudré-Mauroux, autrice
C’est finalement la pandémie qui l’aura amené à publier son bouquin le même jour que sa comparse : sans le Covide-19, il serait sorti une année plus tôt. Un « petit plus » finalement pour Danielle qui se réjouit déjà de partager leurs prochaines séances de dédicaces : On échange énormément par rapport à l’écriture. Comme on est complémentaire, on se stimule l’un l’autre.» Avec son deuxième livre « Le Rituel des fleurs » , la première enquête de l’inspecteur Max Avelar, la romancière originaire de Fribourg s’est inspirée d’un phénomène de société fort. Elle nous plonge dans une histoire qui montre jusqu’où peut aller l’humain quand il n’accepte pas la réalité. » C’est le cas du personnage de Paulette, la grand-mère. Cette femme est une criminelle mais on peut trouver des explications à ce qu’elle a voulu faire pour son fils », explique-t-elle.
Avant tout, raconter des histoires
Outre leur grande complicité, le ciment des deux plumes est d’aimer raconter des histoires. Chaque matin, le binôme part marcher et échange longuement sur ses récits. « Je pense qu’on est vraiment très différents, mais on a toujours aimé écrire. Nous sommes un couple qui s’aide beaucoup, tant dans notre travail de rédaction que de relecture. Pierre est mon premier lecteur, celui sur qui je peux compter pour avoir une critique objective », raconte Danielle. Subtilement, l’autrice veille à ce que tout au long du roman, le lecteur ne puisse pas s’imaginer le clap final de son enquête. « J’avais une idée de la fin dès le début, mais je devais trouver une ouverte à la réflexion », confesse-t-elle. « Oui, et on ne doit pas expliquer la fin d’une histoire, on doit la faire vivre », abonde Pierre de sa voix rauque et assurément poétique.
Le fait de gagner un prix pour son ouvrage l’incite-t-il à poursuivre sur sa lancée et pondre un nouveau livre ? « Si je le fais, ce sera un roman historique, mais c’est un travail de documentation énorme. Pour « On a volé la vache à Firmin », c’était un peu un challenge. Je sentais que j’avais envie s’écrire. » Amoureux du mot jusque, il espère avoir réussi à faire vivre au lecteur dans cet ouvrage un certain Valais « avec ses valeurs et ses travers ». De son côté, Danielle pense elle changer de sujet dans son prochain roman : « J’aime varier les genres. Cette fois-ci, ce sera une enquête dans un domaine plutôt politique, mais toujours local. L’histoire, assez profonde, va s’étendre jusqu’à Berne puisqu’on parlera aussi de la coupole. »